Publié le 30/09/19

Connaissance et croyance : quelle frontière ?

Certaines personnes doutent que la Terre est ronde. Ils pensent par exemple que celle-ci est plate. Cette idée  est récurrente en cosmologie (branche de l'astrophysique qui étudie l'origine, la nature, la structure et l'évolution de l'Univers). Mais dès l'Antiquité, avec l'école pythagoricienne, la notion de la forme sphérique de la terre fut émise. Aujourd'hui, la science abonde en ce sens mais le platisme perdure, et le doute peut s'installer. 

 

Ce doute est-il une erreur ?

 

Dans une pensée critique, le doute est essentiel. S’opposer au doute ou affirmer ne pas douter revient à exprimer une certitude, et cette certitude personnelle peut alors revêtir des allures de vérité aux yeux de celui qui y croit. D’un point de vue extrême, penser et s’exprimer différemment de cette certitude revient à être dans l’erreur.

Pourtant, il arrive souvent que ces personnes qui affirment savoir sans douter ne puissent elles-mêmes prouver l’existence ou la véracité de ces choses.

Vous-mêmes, comment savez-vous que la Terre est ronde ?

  • Parce que vous avez vu les photos de la NASA ?
  • Parce que la majorité des gens le savent ?
  • Parce que vous l’avez appris à l’école ?

Mais ces réponses ne suffisent pas à vous donner raison car la NASA aurait pu trafiquer les photos et les gens et l’école peuvent se tromper. Dès lors, si, effectivement, la Terre est ronde alors vous auriez raison pour de mauvaises raison et avoir raison pour de mauvaise raisons ce n’est pas avoir raison.

La connaissance est ainsi une notion très subtile…

 

A titre personnelle, je crois que la terre est ronde mais je n’en sais rien. Je n’en ai pas le savoir. Pourquoi ? Parce que je suis incapable de comprendre un fragment des équations ou de l’un des raisonnements scientifiques qui permettent de le prouver.

Dans ces conditions, la moins mauvaise réponse à la question « comment savez-vous que la Terre est ronde ? » serait de dire que vous n’en savez rien mais vous faites confiance au consensus de scientifiques dont c’est le métier de savoir prouver ces choses-là.

 

Ne pas savoir n’est pas un problème du moment que nous avons conscience du champ de croyance vers lequel nous tendons sans pour autant le fermer au doute. Ne pas douter et affirmer savoir sans pouvoir prouver ce que l’on prétend savoir signifie en réalité l’expression d’une croyance. C’est l’expression d’un savoir produit par d’autres personnes, et s’il n’y a pas production de la connaissance alors il n’y a pas de savoir ; il n’y a qu’une relation de confiance envers autrui, qui ne résulte que d’une forme de croyance.

 

Le plus dur consiste alors à reconnaître et exprimer cette croyance en tant que tel. Or, il arrive que cette croyance se révèle si forte qu’elle en devienne une certitude dont toute remise en cause est immédiatement rejetée, car la contradiction est perçue comme intolérable, une impossibilité, une forme de sacrilège. Le danger réside alors dans un risque d’appauvrissement du débat et de la réflexion.

 

Pierre Slama